Valda Behrens – Edmonton Journal
Si vous n’avez fait que survoler les nouvelles en Alberta ces derniers mois, vous pourriez avoir l’impression que la GRC est une force de police archaïque et désorganisée, incapable de répondre aux besoins de notre province.
Vous pourriez également conclure, si vous vous en teniez aux récentes mesures législatives de Danielle Smith nommant un commissaire pour le nouveau Service des shérifs de l’Alberta, supervisé par le nouveau chef Sat Prahar, que la GRC jouera un rôle policier de moins en moins important en Alberta. C’est une suggestion qu’a avancée l’ancien premier ministre Justin Trudeau dans les derniers jours de son mandat, en février dernier, non seulement pour l’Alberta, mais pour l’ensemble du pays.
M. Trudeau, dont la popularité en était au plus bas, a fait valoir qu’il était temps de retirer la GRC des contrats de services de police et d’en faire une sorte de FBI à l’américaine. Dans un style pour le moins étrange qui lui est propre, M. Trudeau a publié un livre blanc quelques jours avant sa démission… un livre blanc qui allait assurément, semble-t-il, à l’encontre de la GRC et du gouvernement fédéral en général. Quelques semaines après les élections, l’annonce rapide du premier ministre nouvellement élu, Mark Carney, entourant le recrutement et l’intégration immédiats de 1 000 agents en uniforme pour pallier la pénurie de gendarmes en Alberta et ailleurs se veut peut-être la meilleure illustration de la situation.
Il est rare de trouver un membre vivant de la famille Trudeau qui soit sur la même longueur d’onde qu’un gouvernement albertain profondément conservateur, mais c’est pourtant le cas. Les moments étranges donnent lieu à des amitiés tout aussi étranges, et à des ennemis encore plus étranges. En tant qu’ancienne employée de la GRC à la fonction publique, au détachement de High River, j’ai vu mon lot de bonnes et de mauvaises situations dans le cadre du maintien de l’ordre. Il ne fait aucun doute que c’était loin d’être la perfection, et la GRC a parfois eu beaucoup de comptes à rendre.
Mais la réalité, c’est que la GRC, ayant servi notre province pendant plus de 100 ans, est profondément ancrée dans le tissu social de nombreuses communautés albertaines dont la seule relation en matière de services policiers a été celle tissée avec la GRC. Apprendre à connaître le personnel non en uniforme qui travaille dans quelques-uns des 114 détachements de la province, comme je l’ai fait, tout comme des centaines d’autres qui travaillent pour des unités spécialisées dans les bureaux de district, a été pour le moins révélateur.
Il convient de noter que ce sont principalement des gens de l’Alberta qui occupent ces postes, et non des agents en uniforme dont les affectations sont temporaires et qui sont appelés à passer à autre chose sous peu, des personnes de l’Alberta qui comprennent parfaitement l’impératif d’assurer la sécurité de tous et ce qu’il faut pour gérer un service de police agile et de pointe, bénéficiant d’une influence non seulement locale, mais aussi régionale et nationale.
En tant que vice-présidente régionale représentant les expériences de ces gens de l’Alberta, j’ai constaté à quel point ceux qui occupent des postes opérationnels sont tout aussi passionnés que notre premier ministre par l’idée d’assurer un service de police solide et intégré dans leurs communautés.
J’ai récemment participé au salon de l’Association des municipalités de l’Alberta, à Calgary, et à celui des municipalités rurales de l’Alberta, ici même, à Edmonton la semaine dernière, afin de mettre en lumière ce réseau plutôt invisible de membres du personnel de la GRC en Alberta.
J’ai été frappée par le nombre de maires et de conseillers municipaux, des grandes municipalités comme des petites, qui m’ont contactée pour me faire part de leur confiance envers la GRC, soulignant la relation très active que leurs communautés entretiennent avec les commandants de détachement et d’autres membres clés du personnel. Nombre d’entre eux ont également souligné leur engagement à renforcer ces relations encore davantage.
Le recrutement et la formation de 1 000 agents en uniforme qualifiés supplémentaires, certains qui seront affectés à pourvoir les postes vacants en Alberta, sont une excellente nouvelle. Ces municipalités sont surtout préoccupées par le recrutement de personnel, et non par la rupture des liens. Il ne fait aucun doute que l’argent des contribuables investi dans le service de police provincial de l’Alberta pourrait être utilisé sur-le-champ pour renforcer les rangs de la GRC, plutôt que de repartir de zéro avec une nouvelle agence de police. Il n’y a que quelques élus qui m’ont parlé de la nécessité d’explorer leurs options avec la GRC et d’envisager un scénario policier différent.
Avec tout le blabla politique entourant les services policiers dans notre province, il est sans doute difficile de savoir ce que pense réellement la population de l’Alberta. Selon la Fédération de la police nationale, 78 % de la population albertaine ne voient aucune raison de changer de modèle policier. Au fond, les gens de la province se soucient de résultats solides en matière de sécurité publique, assurée avec efficacité, et les municipalités semblent vraiment vouloir améliorer ce qui fonctionne déjà bien avec la GRC.
J’espère que notre première ministre et ses collègues sauront entendre ce message.
